A Michèle et Dudu

Pour leurs cinquante ans de vie commune

 

 

Faisons, si vous le voulez bien,

Une petite marche arrière ...

 

 

Samedi 13 septembre 2003, 17 heures :

 

-  Dudu  ! Dépêche-toi ! Ça les est !

Ils sont presque tous là !

Hi hou ! hi hou ! hi hou !

 

-Attends  "mamman" !

Je prépare mes glaçons!

 

Revenons maintenant 50 années en arrière ...

Lundi 19 octobre 1953.

 

Souvenez-vous ... C’était hier ...

En l’église Saint Nicolas de Troyes,

Julien, fils de commerçant sur la place du

marché

Épouse Michèle, fille des bouchers de la rue

Colbert.

 

Ce fils de commerçant

Sur la place du marché

Amateur de baeckeofe

Gros gourmand, fin gourmet

Avait certes de l'étoffe

Et, soit dit en passant,

La fille de nos bouchers,

Ceux de la rue Colbert,

Avait de beaux jarrets !

Ils  devaient donc  se plaire... 

 

Bref, les voilà mariés ... pour le meilleur et

pour le pire !

 

Dudu allait rester Dudu,

La Michèle, devenir la Tu

La poupouillarde ou bien  « mamman »

Et ... Oserais-je le dire ?

Les jours de très grands sentiments,

La mère dépouille ou la locdu.

 

Ah oui ! C'est une bien belle histoire.

J’avoue qu’elle m’a bien inspiré.

Aussi, à ma façon, ce soir

Je prends le risque de  la conter.

                                 

 

  Fraîche émoulue , et libérée,

  De l’enseignement ménager,

  Michèle était bonne à marier.

  Pour notre néo-ménagère

Fallait quitter la rue Colbert !

Pas question d' rester à rien faire !

 

Lors, foin de Macette de Régnier,

La  Marie-Louise fera l’affaire.

C’est donc dans le salon de thé

D’un pâtissier nommé Fohrer

Que la belle et pulpeuse Mimi

Séduira son futur mari.

 

Il était beau , beau comme un prince

Qui n'a, hélas, jamais régné,

Et quand ils se serrèrent la pince,

Ils étaient presque fiancés.

 

Pour nos  tout jeunes tourtereaux,

Il faut se rendre à l’évidence :

La vieille bonne méthode  Ogino

Fît pire que la ligne Maginot,

Car c’est alors en abondance

Que débarquèrent leurs beaux marmots :

 

D'abord la “ Choute “ et puis le “ Bert “.

Voilà qu'ensuite arrive le “ Teck “.

Mine de rien, ça fait déjà trois !

Mais à souvent plonger le doigt

Dans le même pot de confiote,

Vinrent, plus tardivement, la mère “ Ziote “

Et, enfin, l’ultime “ Zorzor “...

Reconnaissez qu'ils ont fait fort !

 

Drôles de prénoms pour des bambins !

D'ailleurs,vous pourrez consulter

N'importe quel  calendrier,

De Basile à Sylvestre, voyez !

Aucun  d'entre eux ne trouverez !

Loin de moi cette pensée

Que leurs très chers bébés

Ne seraient pas des Saints ...

 

Reconnaissons que si elle eut

Usé de cette autre "technique"

Qu’on ne doit à Dieu ni à Coué,

Il eût été fort regrettable

De n’avoir alors point connu

Leurs cinq mômes bienheureux

Et, aujourd’hui, d'se retrouver

Évidemment bien moins nombreux

Autour de ces magnifiques tables

Dans ce décor si  sympathique !                                                   

Mal en bouchers, nos jeunes mariés

Rendirent bien vite leur tablier.

Aussi, pour se payer d' la graille,

C’est dans le slip et le maillot

Que Dudu donnera le tempo

A des ouvrières de la maille.

 

Commença alors une longue errance

Dans notre beau pays de France.

 

 

  De leurs folles aventures,

  C’est aujourd’hui ... en kilos !

  Que se mesurent leurs souvenirs.

 

De Roanne, ah ! les bons clafoutis

de la petite boulangerie

Qu’ils se tortoraient certains après-midi.

 

D’Aubervilliers, les immenses marchés

Et leurs belles devantures.

 

Il voulut voir Vesoul

Et elle a vu Vesoul !

Mais difficile dans une ville de broderie

De trouver de bonnes confiseries !

 

Alors, il y eût Nancy et sa périphérie.

Le Nancy de Stanislas 1er,

Des bergamotes et des madeleines.

Le Nancy des maîtres verriers,

Des macarons et eau de vie de mirabelles.

 

Y vinrent-ils pour le palais ducal

Ou le plaisir de leur palais buccal ?

Pour les œuvres d’Émile Gallé

Ou pour s’y régaler ?

Pour tout cela, nous n’en doutons pas !

Il n’est pas incompatible, en effet,

d’apprécier

Tout à la fois, les chefs-d’œuvre d’un Corot

Et les hors-d'œuvre d’un Cora !

 

 

  Durant toutes ces années,

  Michèle et Dudu,

  Vous avez très peu couru !

  Mais on peut dire sans se tromper

Que vous avez... hyper marché !

 

 

Julien,

votre vie n’est peut-être pas l'éden

Dont vous rêviez souvent

 

Votre paradis ?

Des magasins, des magazines

Et de bonnes odeurs de cuisine !

 

Vivre à la campagne, entourés de vos minots,

Au milieu d’un grand jardin tout plein de

bigarreaux.

Et, pour rester dans le champêtre,

Voir chaque matin en ouvrant vos fenêtres

Une belle enseigne Auchan !

 

 

Michèle,

Parfois, on te sent tout ainsi.

On a l’impression que pour toi aussi,

La vie n’a pas été l’éden dont tu rêvais

souvent.

 

Outre les enfants que tu aimes materner,

Les bons crus et bonnes cuites...

occasionnelles !

Tu aurais aimé...

Danser  dans des guinguettes,

Être la fleur du bal,

Tortiller des gambettes,

Et, comme à tes 16 ans,

Être la reine des carnavals !

Avoir la taille mannequin

T’habiller chez Chanel !

 

 

 

  Alors insatisfaits tous les deux ?

  Mais regardez un peu dans votre rétroviseur,

  N’y voyez-vous pas une vie pleine

  de petits bonheurs ?

 

Les instants d’émerveillement

Devant le berceau des enfants,

 

Les grandes vacances à Rimini,

Les baignades à Saint Jean de Luz,

 

Les dimanches à la campagne, Grange

l’Évêque, le plateau,

Les mémorables fiestas familiales,

Les bisous en catimini

Pendant les heures de travail ...

Les petits cadeaux forts appréciés

Même si de trop dépenser on l’accuse ...

 

La naissance des petits-enfants

Et de l’arrière petit garçon !

 

Vous rêviez d’avoir plus d’argent !

Aujourd’hui vous avez de l’Or !

Un petit bémol cependant ...

Ce ne sera ni en lingots, ni en kilos.

 

Ce soir, le papy, la mamie,

Si vraiment le cœur vous en dit,

Poussés par votre faim de vie,

Dites oui à vos envies !

Et cédez à la tentation

Que votre volonté soit faite !

 

Vous pouvez aussi pardonner

A ceux qui vous ont énervé,                             

Et, en ce jour de fête,

Dire oui, comme il y a 50 ans,

Oui à une autre décennie

Et des Noces de Diamant !

 

Regardez, Michèle et Dudu, “ ça les est “ !

Et maintenant qu’ils sont tous là

Et que les glaçons sont prêts,

Alors, en cœur nous vous disons ...

 

 

JOYEUX  ANNIVERSAIRE

 

                                                    septembre 2003

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ven.

28

juil.

2023

J'irai courir sur vos tombes

 

Et but ! ». 

 

Ainsi parlait Daniel, d’une voix aussi puissante que l’était son pointu, quand, d’un tir ravageur, il venait de marquer.

Celle-ci résonne encore dans la rue Saint-Martin comme un écho sans fin renvoyé par les murs de l’église séculaire.

 

Zut ! Trompé par Bimbo ! Vévé, qui se vantait d’égaler Formici, gardien emblématique du grand Troyes Aube Football, en était dépité.

 

Daniel, il faut le dire, était un grand gaillard, pas vraiment cérébral, mais reçu au certif, dont la force égalait sa surcharge pondérale. Ses presque 100 kilos, un tissu adipeux bien supérieur aux normes, lui valurent ce surnom au sens éléphantesque. Au demeurant gentil.

 

Il arrivait parfois qu’on lui lance un défi : le tour de La Ville aux Bois - ce hameau haut perché qui devint Amançois en 1825 - dans une course à vélo.

 

Cinq kilomètres de course avec une pente moyenne de presque 5 %, pour mettre en appétit, et quelques courts passages à près de 12 % !

Sur la ligne de départ, trois, quatre vélos classiques, munis de dérailleurs, et notre ami Bimbo chevauchant une vieille Bleue, un deux-roues délesté de son précieux moteur. Malgré le handicap lié à sa monture - à peine 3m 50 à chaque tour de pédale - Daniel, dans la montée, parvenait à nous suivre, faisant même jeu égal, car le braquet unique de sa bécane spéciale était mieux adapté aux traîtres raidillons qui marquaient le parcours. La masse de la machine semblait bien peu de chose sous la musculature du redoutable athlète. À partir de l’église, il finissait quand même par céder du terrain. Le développement cette fois devenait une entrave et Daniel, ahanant, dépassait l’édifice sans le moindre regard sur ce joyau roman daté du 12 ème siècle, l’église de l’Assomption.

 

Cette église paroissiale au plan rectangulaire cache de nombreux trésors que nous étions, sans doute, nombreux à ignorer. Car lequel d’entre nous avait seulement franchi son porche en pan de bois et pénétré le lieu ?

 

Sur le sol de sa nef, recouvert de tomettes, un chevalier en armes, Messire de Rochetailler, et sa dame Damoncourt, dévoilent leurs armoiries sur  le calcaire luisant d’une grande dalle funéraire. Écoute, cher visiteur, les voix évanescentes de leur esprit rodeur, murmurer aux oreilles leurs histoires de famille ! Ils parlent de leurs bonheurs, de leurs peines, de leurs larmes.

 

Deux autres pierres tombales, celles d’Antoine de Mertus et de Gaspard de Pons, vous invitent discrètement à remonter le temps des chevaliers-seigneurs qui édictaient des lois et rendaient la justice.

 

Sur les murs dévoués à la sobriété, des statuettes en bois peint. Sainte Catherine, saint Eloi ; saint Sébastien, martyr, le torse percé de flèches, saint Nicolas de Myre, les trois doigts étendus au dessus du tonneau, invitent à la piété.

 

Sur sa « bicyclette » bleue, Daniel, très à la peine,  inspirait la pitié. Il vivait sur l’asphalte un autre chemin de croix. Mais qu’on ne s’y trompe pas ! Daniel courbait l’échine mais ne s’avouait vaincu et restait bien visible dans nos rétroviseurs.

Il n’est de bête blessée qui ne trouve les ressources pour un ultime combat. Et passée la grande ferme, dite de l’ancien château, la pente devenait douce. Un faux plat salvateur pour le sérieux coup de pompe que connaissait Daniel.

 

Nous virions à la mare très largement en tête. La promesse d’une descente nous redonnait des jambes. La descente, 6% en moyenne, les premiers hectomètres à près de 15% !

Hélas, nos développements montraient vite leurs limites. Passé un certain rythme, relancer nos vélos devenait impossible. Notre accélération n’obéissait cette fois qu’à la seule pesanteur et pas à nos mollets. Sur ce terrain encore, notre pesant Bimbo et sa lourde machine avaient alors sur nous un précieux avantage. Et plus Daniel fonçait, plus notre avance fondait !

Heureusement la côte n’était pas des plus longues et nous pouvions atteindre la 443 avec un peu d’avance. Un axe très fréquenté qui était à l’époque le passage obligé, du moins le préféré, des vacanciers du nord. Belges et Néerlandais passaient ici en nombre pour rejoindre, à Ablis, l’autoroute du soleil. Nous devions sur cette route, rester très vigilants.

 

C’est ainsi que Daniel, de montées en descentes, de descentes en faux plats, sans jamais nous rejoindre, jouait à l’élastique, pour n’avoir sur la ligne, qu’un hectomètre ou deux de retard sur nos cycles. S’il n’en avait conscience, Daniel réalisait un véritable exploit.

 

« Et but ! »

C’est dans l’eau qu’il fallait récupérer la balle.

Mais comment aurait-il pu en être autrement sur ce quadrilatère aux limites naturelles constituées par l’Amance et le « ru de la honte », le ru des polémiques, que d’aucuns accusaient d’être le pot de chambre de gens indélicats.

 

Nous courions sans vergogne, et sans nous émouvoir,  sur l’aire abandonnée, pour des raisons d’espace et de santé publique, du cimetière paroissial où jadis reposaient notables et bons chrétiens. Au chevet de l’église, comme il était d’usage. Et même si de longtemps leurs derniers ossements avaient été levés, placés en fosse commune dans le nouveau cimetière, leurs esprits rodaient là, dans cet espace sacré que nous venions troubler.

 

« Et but ! »

Quand le royaume des ombres se laissait envahir par des rois insolents, le cimetière d’autrefois revenait à la vie et sa terre, en jachère, devenait pépinière de modestes talents.

Francis, Philippe, Bimbo ; Daniel, Fernand, Nanard ; Michel, Jean-Jacques, Bidule ; Jean-Luc , Dany et Serge ; Alain, Jean-Paul, Philippe, nous étions dix et cinq, nous étions une quinzaine qui, après le turbin, débarquions au cimetière pour le grand festival des soirées estivales.

Roulettes et passements d’jambes, grand pont, double contact ! Un festival de « cannes » sur une scène macabre.

 

Deux pulls et deux chemises et nous avions les buts. Quatre pieds qui se rapprochent et le premier d’entre eux qui parvenait à mordre sur les orteils de l’autre, choisissait, un à un, les membres de son équipe.

 

Les niveaux, avouons-le, étaient des plus divers, des acteurs confirmés, licenciés dans des clubs, jusqu’aux simples figurants qui apportaient le nombre. Mais l’envie et la joie étaient bien partagées. Et tout naturellement, Formici, Zorzetto et autres Pleimelding, les nouvelles stars d’une Aube sortie du crépuscule, devenaient les modèles qu’on rêvait d’imiter.

 

Les filles nous regardaient. Supportrices excitées, elles encourageaient l’un, criaient le nom de l’autre. Et sans doute, nos parades étaient-elles décuplées par l’idée qu’une d’entre elles serait peut-être sensible à nos prouesses techniques. Si elle ne l’était par nos charmes athlétiques !

 

S’en revenant du bois, Dany, le bûcheron, apparut un beau jour muni de quelques perches. Deux rectangles de bois d’une longueur de 4 mètres se trouvèrent face à face, plantés dans le sol dur.

Les pulls et les chemises retrouvèrent leurs mannequins.

Ces limites dans l’espace mettaient enfin un terme aux discussions stériles sur la validité de tel ou autre but.

Dès lors, notre Vévé devenait le phénix et l’hôte de ces bois.

Quand les charmes tremblaient sous un tir appuyé, la reprise de volée d’un Bimbo ou d’un Liard, les filles se gondolaient. Elles espéraient, sans doute, l’envolée des bois verts ! Histoire de s’amuser.

Mais les traverses tenaient.

 

Nous jouions bien ou mal, mais nous jouions heureux ! La passion était là. La fatigue quotidienne de ceux qui travaillaient, disparaissait. D’un coup. Comme par enchantement.

 

Il en était ainsi chaque soirée estivale. Au sortir du travail ou au retour des champs, nous nous retrouvions là.

Jusqu’à « l’heure de la soupe ».

 

Derrière les contreforts de l’église Saint-Martin, il arrivait parfois qu’un espion vienne nous voir. Tatave, Jean-Pierre ou Jacques.

Chacun, évidemment, encourageait les siens mais dans leur tête une graine, une précieuse radicule, se développait déjà. Cette idée que, peut-être, notre village d’Amance pourrait franchir le pas et permettre à ses « stars » de chausser, pour de bon, des crampons officiels.

 

L’idée fit son chemin.

 

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ven.

23

juin

2017

La pensée du jour

Toute musique qui ne peint rien n'est que du bruit.

[ Jean le Rond d'Alembert ] - Discours préliminaire à l'Encyclopédie

 

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